Le burn-out : comprendre, prévenir et surmonter l’épuisement professionnel

Face aux injonctions modernes où la pression au travail ne cesse d’augmenter, le burn-out est devenu un sujet de préoccupation majeur. Comprendre les origines de ce concept et ses mécanismes est essentiel pour prévenir cet état d’épuisement mental et physique. La psychologie clinique offre des ressources précieuses pour dénouer ces difficultés et accompagner les individus vers une meilleure gestion de leur bien-être.

Qu’est-ce que le burn-out ? Origines et histoire

Le concept de burn-out a été introduit pour la première fois dans les années 1970 par le psychologue Herbert Freudenberger, qui a observé ce syndrome chez des professionnels de la santé fortement impliqués émotionnellement dans leur travail. Freudenberger a décrit le burn-out comme un épuisement physique et mental résultant d’une surcharge de travail et d’un stress prolongé. Par la suite, Christina Maslach (Maslach et al., 2001), psychologue américaine, a élargi le concept en précisant trois dimensions du burn-out : l’épuisement émotionnel, la dépersonnalisation (le détachement des autres), et le sentiment de non-accomplissement personnel. Dans une autre étude, elle démontrera que le burnout a un impact statistiquement significatif sur la santé mentale, conduisant à des symptômes tels que l’anxiété, la dépression, et des troubles du sommeil (Maslach et Leiter, 2016).

Données et statistiques

Pour comprendre l’ampleur du burnout, examinons certaines statistiques clés provenant de sources crédibles :

Eurofound (European Foundation for the Improvement of Living and Working Conditions, 2018) : Dans l’Union Européenne, environ 28 % des travailleurs déclarent ressentir régulièrement du stress au travail, ce qui contribue largement au développement de l’épuisement professionnel. Le rapport met en lumière les différences sectorielles et la dynamique de pouvoir au sein des entreprises (source: https://www.eurofound.europa.eu/en/publications/2018/burnout-workplace-review-data-and-policy-responses-eu).

Organisation Mondiale de la Santé (OMS) : Selon un rapport de 2019, environ 60 % des médecins et près de 40 % des enseignants éprouvent des symptômes de burnout. Ces chiffres proviennent de l’étude mondiale de l’OMS sur le burnout, qui considère des variables telles que les heures de travail, l’environnement professionnel et le soutien social (source : https://www.who.int/news/item/28-05-2019-burn-out-an-occupational-phenomenon-international-classification-of-diseases).

Rapport Gallup (2022) : ce rapport déclare que 76 % des travailleurs aurait ressenti au moins une fois un état de burnout ! Gallup a mené une enquête basée sur un large échantillon de travailleurs de divers secteurs pour évaluer les niveaux de stress professionnel et de satisfaction au travail (source: https://www.gallup.com/workplace/406232/uncomfortable-necessary-conversations-burnout.aspx).

Les signes avant-coureurs du burn-out

Le burn-out se manifeste donc, entre autres, par une fatigue persistante, une perte de motivation, et un désengagement profond. Contrairement à la fatigue temporaire que l’on peut ressentir après une période de travail intense, le burn-out est un état chronique qui peut engendrer de graves répercussions sur la santé mentale et physique.

Reconnaître les symptômes précurseurs est fondamental pour intervenir à temps et éviter que la situation ne dégénère :

  • Fatigue chronique : Une sensation d’épuisement qui persiste malgré le repos.
  • Baisse de performance : Difficulté à se concentrer, erreurs répétées, baisse de productivité.
  • Déconnexion émotionnelle : Un sentiment d’indifférence, voire de cynisme, à l’égard du travail et des collègues.
  • Symptômes physiques : Troubles du sommeil, tensions musculaires, maux de tête.
  • Changements émotionnels : Irritabilité, anxiété, voire des symptômes dépressifs.

Le type de personnalité des personnes touchées par le burn-out

Le burn-out touche souvent des individus très engagés dans leur travail, ayant un haut sens des responsabilités et souvent une tendance au perfectionnisme. Ces personnes cherchent généralement à atteindre des objectifs élevés et peuvent avoir du mal à poser des limites face aux exigences professionnelles. Ce profil n’est pas exclusif aux métiers de l’aide, même si les professions dans lesquelles l’investissement émotionnel est important, comme les soins ou l’enseignement, semblent particulièrement à risque. La pression à maintenir des performances constantes peut entraîner une usure progressive, débouchant sur l’épuisement.

Prévenir le burn-out en milieu professionnel

La prévention du burn-out repose sur l’adoption de pratiques simples mais efficaces au quotidien :

1. Établir des limites claires

La frontière entre vie professionnelle et vie personnelle doit être respectée. Apprendre à dire non à des tâches supplémentaires peut aider à préserver son énergie et son équilibre. Concrètement, le droit à la déconnexion, la limitation des différentes sollicitations numériques ( notifications, alertes, coupure du téléphone professionnel ) permettent de ne pas être mentalement ramené à tout moment au contexte de travail.

2. Prendre des pauses régulières

Il est essentiel de s’accorder des moments de repos pour éviter l’accumulation de la fatigue. Ces pauses permettent de se recentrer et de mieux gérer la pression. Si ce conseil peut paraitre trivial, il a des effets néanmoins pertinents puisqu’il permet de sortir mentalement du contexte de la tâche en cours, et, dès lors, de vider la mémoire de travail, ainsi que les émotions et la tension qui y sont associées.

3. Encourager la communication

Dialoguer avec ses collègues ou son supérieur à propos des difficultés rencontrées peut alléger le fardeau psychologique et ouvrir la voie à des solutions collectives. D’une part, la chaine hiérarchique du travailleur a des obligations légales envers les risques psycho-sociaux auxquels sont exposés ses salariés. D’autre part, la souffrance au travail fait trop souvent l’objet d’une omerta que l’employé s’inflige lui-même, se supposant -très souvent à tort- le seul à être dépassé.

L’apport de la psychologie clinique dans la gestion du burn-out

Face à l’épuisement professionnel, la psychologie clinique offre une approche profondément enrichissante. Elle se concentre sur la compréhension des mécanismes psychiques en jeu, en évaluant l’impact du stress chronique et en aidant l’individu à identifier les sources de son mal-être. Ce travail permet de déceler les schémas psychologiques qui contribuent à l’épuisement, offrant ainsi des outils pour réorganiser son rapport au travail et à ses responsabilités.

De même, elle propose une exploration plus approfondie des dimensions inconscientes qui sous-tendent le burn-out. Souvent, des désirs ou des attentes inconscientes poussent les individus à se surinvestir dans leur travail. Ces dynamiques, liées à des idéaux ou à des conflits internes, peuvent alimenter un cycle d’épuisement. Le cadre psychothérapeutique permet de dénouer ces conflits, en dévoilant les attentes et les angoisses qui pèsent sur la personne. Cette approche offre ainsi une transformation en profondeur, permettant à l’individu de rétablir une relation plus apaisée avec son travail.

Les bienfaits de cette approche sont multiples : elle permet à la personne d’acquérir une prise de conscience des schémas psychologiques à l’origine de son épuisement, de se réapproprier ses ressources internes pour mieux gérer son rapport au travail, et de mettre en place un équilibre durable entre vie professionnelle et personnelle. Contrairement aux approches qui ne visent que l’atténuation des symptômes, la psychologie clinique s’attache à traiter les racines du mal-être, favorisant ainsi une véritable transformation psychique.

Surmonter le burn-out avec l’aide d’un psychologue

Le soutien d’un psychologue clinicien est essentiel pour comprendre et surmonter le burn-out. Le travail thérapeutique permet au patient de prendre du recul, de décrypter les causes profondes de son épuisement, et de rétablir une relation plus sereine avec ses activités professionnelles.

  • Un espace d’écoute bienveillant : Le psychologue offre un cadre sécurisé où la personne peut exprimer ses émotions sans jugement.
  • Analyse des causes profondes : Le travail en profondeur permet de comprendre comment le stress au travail est lié à des enjeux personnels plus larges.
  • Rééquilibrage durable : Le suivi psychologique permet d’instaurer des changements durables dans la manière d’aborder le travail et de prévenir les récidives.

Conclusion

Le burn-out, découvert dans les années 1970, reste une réalité complexe qui touche de nombreuses personnes aujourd’hui. Cependant, grâce à la psychologie clinique, il est possible d’en comprendre les racines et d’adopter des solutions adaptées. Si vous ressentez les signes d’un burn-out, consulter un psychologue peut vous permettre de retrouver un équilibre, en travaillant en profondeur sur les facteurs qui ont contribué à cet épuisement, être une première étape décisive vers un mieux-être.

Références

  1. Herbert Freudenberger, L’épuisement professionnel : la brûlure interne, Chicoutimi, Québec, G. Morin, 1987, 190 p
  2. Maslach, C., & Leiter, M. P. (2016). Understanding the burnout experience: Recent research and its implications for psychiatry. World Psychiatry, 15(2), 103-111.
  3. Schaufeli, W. B., & Enzmann, D. (1998). The burnout companion to study and practice: A critical analysis.
  4. Awa, W. L., Plaumann, M., & Walter, U. (2010). Burnout prevention: A review of intervention programs. Patient Education and Counseling, 78(2), 184-190.
  5. Organisation Mondiale de la Santé (2019). Burn-out an « occupational phenomenon »: International classification of diseases.